mardi 20 avril 2010

Ecrire à Butembo - Chapitre 16 - Kinshasa a beaucoup changé ? Ah Telesi mama ! Nakosala yo mabe ! Ah Telesi, nakobamba yo Ngondo!

Didier de Lannoy
Butembo !
sous-titré On m’envoie écrire ailleurs ! Ici, je dérange trop ? compte-rendu en musique d’un voyage dans le temps, à Kinshasa, 23 novembre 2007 - 11 janvier 2008
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Extraits

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Kinshasa a beaucoup changé ?

Ah Telesi mama ! Nakosala yo mabe! Ah Telesi, nakobamba yo Ngondo!


On me pose des questions zarbis ! On me dit « N’est-ce pas que Kinshasa a beaucoup changé ? »

Je suis tenté de répondre par quelques autres questions tout aussi stupides et rigolotes : « Que pensez-vous de la situation politique en Belgique ? Quel peut être l’avenir au sein de l’Union européenne de ce minuscule « territoire de Belgique » qui, depuis l’Indépendance du Congo (« La Belgique, la Belgique ? Aidez-moi… Rappelez-moi… Ne serait-ce pas une province du Congo qui a fait sécession en 1960 ? »), paraît ne plus très bien se porter ? Pensez-vous que ce « territoire de Belgique » va bientôt éclater en plusieurs morceaux et que, d’ici peu, ses différentes composantes

- La chefferie Wallonie, la chefferie Flandre et le centre extra-coutumier de Bruxelles !

accèderont, à leur tour, à l’Indépendance ?

Mais pourquoi veut-on absolument que Kinshasa ait « beaucoup changé » ? Dans quel sens ? Pour faire plaisir ou donner tord à qui ? Ou raison à quelles autres personnes ? Que souhaite-t-on que je réponde ?

Bien sûr les choses évoluent ! Il y a beaucoup moins de cheveux tressés et de salons de coiffure (et beaucoup plus de perruques). Et un nombre important de services de « remise en bon état de marche » en tous genres (garages et magasins de pièces de rechange, dispensaires et


Et même à Kintambo, en bordure de l’avenue Kasa-Vubu, en face des ngandas lassaliens, un salon de beauté généraliste (le « Salon l’Accomplissement ») qui, à en croire son enseigne, se montre disposé à traiter toutes sortes de dossiers : coiffure mixte, massage facial, décoration voiture, habillement mariée…

- Couronnes mortuaires aussi, douchka ?

- Non, ça c’est quelques boutiques plus loin, petite chérie, pour les clients du cimetière de Kintambo !


pharmacies, réparateurs de frigos, de congélateurs et de climatiseurs). Et Sukina et Kako peuvent s’acheter des hamburgers et des pittas à moins de trois cent mètres de chez eux, à Kintambo, chez ML (alias « Maman Luxe » ? une femme d’affaires originaire de Kananga), sur l’avenue Kasavubu, à côté du feu rouge. Et Ya Cécile a perdu beaucoup, beaucoup, beaucoup de trop de kilos. Et le fufu

- Trop de monde à Kinshasa ! Les mamans n’ont plus le temps de produire une farine propre et de qualité ! Et les clients ne peuvent plus se permettre d’être exigeants !

est de plus en plus gris. Et, même si la Skol est toujours pareille, « Matisa Pression » a remplacé « Tonton Skol » dans les campagnes publicitaires d’Unibra. Et le « rond-point Victoire » ne s’appelle plus la « grand-place Vis-à-Vis » depuis que l’endroit n’est plus le temple de référence de la musique congolaise moderne. Et le Parc de la Révolution a lui-aussi été débaptisé et est devenu (mais peut-être cela date-t-il d’il y a longtemps déjà) ou redevenu le Jardin

- Anémique, disent les sales bouches, le JAZK : des léopards faméliques (dont la moquette miteuse n’inspirerait plus aucun fabricant de toques pour dignitaires d’un nouveau Parti-Etat, inspiré de l’ancien MPR), des singes déprimés (qui ne font plus de grimaces et ne jettent plus leur merde à la figure de personne), des oiseaux paresseux (qui ne se donnent même plus la peine de chanter des hymnes à la gloire du Créateur)… Un éléphant du zoo, fantasque ou inassouvi, aurait même, il y a quelques années, brisé son enclos et aurait été retrouvé dans la commune de Kasa-Vubu, se promenant dans les rues, la nuit, à la recherche de nourriture… ou d’un nganda encore ouvert ou d’un concert d’Evoloko Joker…ou d’une Princesse en divagation…

Zoologique de Kinshasa mais les vendeuses de légumes du marché central et les garagistes en plein air, les épouses stériles et les évangélistes guérisseurs, les aides-serveuses et les ligablistes-assistants, les tresseuses à domicile et les exploitants de cabines téléphoniques, les veuves de militaires et les chargeurs de taxibus (et les étudiantes et les étudiants qui « s’instruisent sur les bestioles », se fourragent, se trifouillent, se pelotent, se fourrent le doigt

- Contact ! dirait Yaki, l’épouse de Bob Dangerfield…

dans le nez les uns des autres, polissent, liment, potassent et rabotent leurs cours d’anatomie ou de sciences naturelles) continuent de s’y donner rendez-vous et

- Voyeurisés par un groupe de jeunes délinquants, fumeurs de diamba, qui s’emparent (comme, jadis, « l’herbivore de Yolo », subtilisait les petites culottes des femmes qui se rendaient au quartier Kimbangu, par un petit chemin peu fréquenté… et les conservait avec amour et respect dans un grand sac en plastique… où elles auraient toutes été retrouvées… et « même le slip d’une religieuse » !) de leurs sous-vêtements épars ?

- Voyons, douchka, voyons ! Tu te prends sans doute pour Pauline Réage… et tu ne fais pas mieux que Gérard De Villiers ? Un peu de tenue quand même ! Imagine que nos enfants et nos petits-enfants (et surtout Sukina, réclamant de pouvoir vérifier ce qu’on écrit sur elle, faisant une recherche à partir de son prénom, parcourant tout ce qui la concerne... mais ne pouvant pas s’empêcher de déborder un peu… ) lisent ton texte ! Et Mamushka ? Et Gougoui Kangni, notre excellent beau-père ? Et Moura ? Et Bibish Mumbu et Joëlle Baumerder ! Et JP Kabeya ? Et le Ministre de la Communication et des Médias du nouveau gouvernement Gizenga (Gizenga II), Emile Bongeli Yeikelo ya Ato ? Et tes trois adoubeurs ? Que vont-ils donc penser de toi, tous ces gens-là ? Et de notre couple ? L’obsédé sexuel et le voyeur, c’est toi ! Personne d’autre (autant) que toi !

- Chéri Samba et In Koli Jean Bofane, alias « Fossoyeur Jones », n’y trouveraient certainement rien à redire, petite chérie ! Freddy Tsimba, non plus ! Ni Salumu Yamba Yamba, ni Vincent Lombume Kalimasi, j’imagine ! Problème eza te !

de s’offrir un lit d’hôtel gratuit dans les herbes hautes…

Kinshasa évolue mais Kinshasa demeure.

Et Butembo ?

Butembo a-t-il beaucoup changé ?

Il faudra que je demande à Freddy Tsimba

- Je le vois en principe ce soir, petite chérie, vers 20 heures !

s’il a aussi

- Effectivement, je lui ai posé la question, ce soir, petite chérie, vers 20 heures… assis sous un auvent, sur Ikelemba, chez Ma Lyly, presque en face de l’endroit où Papa Wemba répétait, dans le temps, avec les musiciens de Viva la Musica … mais il y avait tellement de monde qui passait dans la rue et tellement de gadoue, de plotchs, de platchs, de cris, d’appels des receveurs et des chargeurs indiquant la destination des bus, de huées, d’ovations, de prières, de hourras, de jurons, de supplications, de vociférations, de pétarades et de bruits assourdissants de moteurs de taxis et de taxibus en partance pour Yolo, Limete, N’Djili ou Kingasani que Freddy n’a sûrement pas entendu ma question et que je n’ai certainement pas entendu sa réponse… sans compter que je m’étais installé à côté d’une machine à fabriquer du pop-corn et que Freddy lui-même (piqué dès son retour par des moustiques qui l’attendaient depuis près de deux mois et demi… et se chopant une foutue malaria) avait une très petite voix, ce soir-là… et ne buvait que de l’eau !

récupéré des douilles, des éclats d’obus et des casques troués

- Les Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC), les Maï-Maï du « général La Fontaine », la variante Maï-Maï appelée « Mudundu 40 », le Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP) du général « déchu » Laurent Nkundabatware, les Patriotes Résistants du Congo (PARECO), le Rassemblement pour l’Unité et la Démocratie (RUD), les Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR), les ex-Forces Armées Rwandaises (FAR) et les Interahamwe, les « Monuc » ?

- Ça fait beaucoup trop de monde tout ça, douchka, pour un seul champ de bataille !

dans les forêts ou les montagnes des environs de Butembo.